Jean-Hubert BONDO

Wivine Kabengele : porter haut la culture congolaise par le chant choral

Terre de musique dansante, la RDC l’est depuis toujours, avec le ndombolo et la rumba congolaise. Mais des groupes musicaux initiés et dirigés par des femmes se comptent sur les doigts d’une main. Dans cet environnement macho, une femme, Wivine Kabengele, s’est frayée un chemin et nous propose des sonorités originales. Son groupe s’appelle Bel Canto.

En cette période où la pandémie de coronavirus a réduit la musique de scène au silence, je ne peux pas ne pas exprimer ma solidarité avec les artistes. Je partage leur peine et les exhorte à tenir bon. D’autres parmi les chanteurs, comme le saxophoniste camerounais Manu Dibango, sont même décédés, emportés par ce maudit Covid-19. Concerts annulés ou reportés, enregistrements suspendus en studio, j’ai compris que c’est un virus venu tuer l’art, la musique et la vie sur terre. Et c’est inacceptable !

Wivine Kabengele toujours au front

En plein confinement à Kinshasa pour cause de Covid-19, j’ai pu échanger avec Wivine Kabengele, la fondatrice de l’ensemble vocal Bel Canto. C’est une femme battante et déterminée. Son credo : porter encore plus haut le flambeau de la culture congolaise à travers l’art vocal. « Le Congo, notre pays, a une richesse culturelle immense, mais oubliée. Mon combat c’est de la mettre en valeur par le chant choral », explique Wivine Kabengele.

Séance de répétition de l’ensemble Bel Canto

Malgré le blackout imposé à la musique par le Covid-19, Wivine ne baisse pas les bras. Elle travaille sur plusieurs projets, notamment :

  • La tenue de la session de formation vocale à Kinshasa, ouverte à tout celui qui veut s’améliorer vocalement ;
  • les Noces de Figaro. Il s’agit d’un opéra de Mozart que le groupe Bel Canto pourra interprêter lors de plusieurs productions en France et en Afrique, avec le coaching vocal et technique d’Agnès Brosset, professeure d’art vocal en conservatoire ;
  • sa participation au festival africain de chant choral Africa Cantat prévu en juillet 2020 à Nairobi au Kenya ;
  • un concert de musique à l’occasion de la journée internationale du chant choral en décembre prochain, où un accent particulier sera mis sur le folklore congolais.
Une séance d’initiation musicale organisée par Bel Canto

L’ensemble Bel Canto attendu en Bretagne

Sauf impossibilité majeure, Wivine et son groupe se produiront cette année à Pontivy, une ville bretonne située dans le département du Morbihan, entre la Manche et l’Océan atlantique. Là-bas vit une « forte communauté congolaise », me confie mon amie mondoblogueuse Françoise Ramel, une élue locale très attachée aux échanges internationaux, à la création artistique et aux projets qui ciblent en priorité la jeunesse. Mais c’est aussi à Pontivy qu’Agnès Brosset, qui était à Kinshasa en avril 2019 pour animer une première session de formation avec l’ensemble Bel Canto, a créé un centre de ressource national unique, au cœur d’un vaste territoire rural,  l’Académie d’art vocal.

À propos de l’arrivée prochaine de Bel Canto à Pontivy, Françoise Ramel est enthousiaste. Elle explique : « Quand Agnès Brosset m’a parlé de ce projet de résidence à Pontivy de jeunes chanteurs autodidactes congolais, passionnés de chant lyrique, cela a bousculé mes préjugés et fait naître une vraie curiosité. À l’occasion de la Saison Africa 2020,  recevoir l’ensemble Bel Canto, accompagner cette demarche de création avec l’Académie d’art vocal, amener les écoles à s’y intéresser, à chanter pour et avec l’Afrique, c’est une opportunité rare pour une ville comme la nôtre. »

Et d’ajouter : « Pontivy recèle des milliers d’histoires singulières avec le continent africain, son patrimoine ; ses langues, ses richesses culturelles, mais aussi ses stratégies de développement économique, dont la culture est un pilier trop souvent oublié. Et nous n’en faisons rien. Pourquoi ? »

Grâce à Mondoblog, à son travail journalistique et associatif, Françoise Ramel fait partie du Comité académique Africa 2020 créé en Bretagne le 16 décembre 2019 à l’initiative du ministère de l’Education nationale. Cela ne m’étonne pas. Je me souviens de notre rencontre à Dakar en décembre 2015, au cours d’une formation Mondoblog-RFI.

J’ai été d’emblée marqué par sa générosité, son humilité et surtout sa grandeur d’esprit. Quand je rencontre quelqu’un, avant de lui faire confiance, je l’observe, je le « scanne », comme on dit en Côte d’Ivoire. Françoise aime travailler, collaborer avec des amis ou des inconnus, c’est une grande qualité. Comme Wivine, elle est ce genre de femmes qui n’abandonnent jamais, qui tendent leurs mains pour que s’attrapent les continents et que les générations d’après construisent leurs propres histoires d’amitié entre les peuples, entre les cultures.

Le contexte actuel, sans précédent, nous apprend brutalement que cette nécessité d’agir et de réagir ensemble, de façon responsable et solidaire, est plus que necessaire.

De grosses ambitions, sans moyens

C’est pourquoi porter l’ambition de créer un opéra de Mozart à Kinshasa suscite tant d’intérêt, même si Wivine et l’ensemble Bel Canto doivent encore batailler pour faire avec l’absence de moyens. C’est malheureusement le propre des artistes africains en général, et congolais en particulier. « J’ai reçu des invitations ici et là en Afrique. J’ai envie de parcourir les 26 provinces du Congo, aller à la rencontre de toute la diversité culturelle de mon pays. Mais les moyens me manquent pour déplacer mon groupe », m’a confié la cheffe du groupe Bel Canto. Pourtant, elle ne perd pas espoir.

Du 6 au 13 avril 2020, l’ensemble Bel Canto devait bénéficier de la deuxième édition de la formation vocale avec comme formateurs Thierry Thiebaut, président d’À cœur joie international, et Agnès Brosset, créatrice de l’Académie d’art vocal, Pontivy. Ces deux professionnels de renommée internationale animent bénévolement cette formation de grande qualité, à laquelle d’autres chanteurs, chanteuses, peuvent s’inscrire naturellement. En raison de la crise sanitaire mondiale liée à la propagation du Covid-19, la tenue de cette session 2020 a été reportée à une date ultérieure.

Pour en savoir plus et soutenir ce beau projet de coopération artistique, suivez l’ensemble Bel Canto sur les réseaux et profitez-en pour suivre aussi la riche actualité à venir de la Saison Africa 2020. Initialement programmées de juin à décembre, les différentes manifestations culturelles vont devoir s’organiser sur la base d’un nouveau calendrier, comme vient de l’annoncer le journal Le Monde.


RDC : pourquoi les filles se prostituent ?

Il y a une trentaine d’années, le mot « vierge » pouvait encore s’appliquer à plusieurs femmes et jeunes filles au Congo. À l’époque, la moralité avait encore des adeptes. Mais de nos jours, la prostitution juvénile a atteint des proportions telles que trouver une fille vierge à Kinshasa relève d’un miracle. Même chose pour des garçons chastes. Filles et garçons connaissent le sexe parfois à 12 ou 13 ans.

En matière d’amour, le plaisir veut que quand tu as déjà goûté au sexe une première fois hors mariage, tu aies envie de goûter une deuxième fois, puis une troisième, une quatrième… Finalement tu deviens fan, l’habitude faisant loi. Ainsi commence la prostitution chez les jeunes filles.

Multiples causes de la prostitution des jeunes filles  

Parmi les causes, il y a non seulement l’envie de découvrir le plaisir sexuel, mais aussi et surtout l’extrême pauvreté des jeunes filles. Faute de moyens, elles livrent leurs sexes pour vivre survivre. Ange, une étudiante explique : « Beaucoup de filles viennent de familles très pauvres. J’en connais deux ou trois qui ne pouvaient même pas s’acheter un nouveau sous-vêtement ou même de simples linges hygiéniques. Des garçons les ont aimées et ont commencé à leur offrir des cadeaux : un peu d’argent, un téléphone, une montre, des bijoux… Et quand un garçon te donne de tels cadeaux régulièrement, c’est difficile de lui résister lorsqu’il demande de coucher avec toi. C’est comme ça que beaucoup de jeunes filles sont devenues des prostituées. »

À Kinshasa, une fille peut avoir à elle seule quatre ou cinq mecs, répartis dans les différentes communes de la ville. Un à Barumbu, un autre à Kintambo, à Ngaba ou à Kingasani. Une manière pour elle de maximiser les recettes. Et elle sait bien les gérer au téléphone. Kinshasa est tellement vaste que tous ces garçons ne se rencontreront peut-être jamais pour savoir qu’ils partagent une même pouliche. C’est ainsi qu’on peut retrouver à Kinshasa une fille non mariée mais mère de trois ou quatre enfants. Chaque enfant ayant son propre père !

Pour Mélanie, c’est la faute aux hommes qui veulent goûter à  tous les plats. « Quand une jeune fille est belle et charmante, tous les garçons courent derrière. Et à force d’être sollicitée, la fille finit par céder. Ne dit-on pas qu’une femme trop belle est comme un manguier planté au bord de la route et portant des mangues mûres. Tous les passants veulent cueillir », ironise Mélanie.

Parfois, ce sont les parents eux-mêmes qui poussent leurs filles à la prostitution. Quand ils sont incapables de nourrir leurs enfants, ils disent aux filles : « Débrouillez-vous ! » En d’autres termes, « vous avez le sexe comme marchandise. Monnayez-le ! ».

Vasthi une fille de la rue à Mbujimayi raconte son histoire : « Après la mort de mon père, ma mère ne savait plus nous prendre en charge. Nous étions quatre enfants et j’étais la seule fille. Un jour, maman me dit : « Tu es quel genre de fille, toi ? À quoi sert ta beauté si les hommes ne te suivent pas ? Tu vas te débrouiller,  non ? » C’est ainsi que j’ai eu mes premiers rapports sexuels à 14 ans. »

Dans la plupart des cas, c’est la pauvreté qui poussent les filles à la prostitution. L’État peut-il réduire la pauvreté dans nos familles…


Région du Kasaï en RDC, après la guerre, les enfants meurent de malnutrition  

Dans la région du Kasaï, la guerre entre l’armée et la milice Kamwina Nsapu a créé une véritable tragédie humanitaire. Mais une tragédie oubliée par la communauté internationale. Outre de nombreuses fosses communes et des dizaines de milliers de déplacés, beaucoup sont sans abris et gravement malnutris. L’Unicef estime à plus de 400 000 enfants touchés par une malnutrition sévère.  Au Kasaï-Oriental, la paix est revenue, mais les effets de la guerre sont toujours visibles. C’est le cas, dans le village de Miketa en territoire de Miabi au sud-ouest de Mbujimayi.

Samedi 28 avril 2018. Accompagné de trois journalistes de la télévision britannique Channel 4 News, nous partons de Mbujimayi à la découverte des zones autrefois sous contrôle de la terrible milice Kamwina Nsapu. Dans cette région, beaucoup de localités ont été frappées par les violences de l’armée et des miliciens. C’est le cas des territoires de Tshilenge, Kabeya Kamwanga et Miabi au Kasaï-Oriental. Nous avons choisi de nous rendre à Miabi, territoire où des villages comme Tshijiba, Tshilunde, Mwanza Lomba, Miketa… ont connu les affres de la guerre.

Sur notre route, à chaque fois le spectacle est désolant. Sorren le caméraman demande au chauffeur de ralentir notre jeep ou de s’arrêter pour prendre des images : devant nous, des gens extrêmement pauvres et qui manquent cruellement de nourriture. Pourtant, nous pouvons voir de larges espaces de terres arables non cultivées. Mais comment cultiver alors que les brousses étaient investies par les miliciens et les soldats ? Un commerçant explique : « Dans tous ces villages, des personnes ont été tuées par balles ou égorgées, et d’autres blessées à la machette ou au couteau. Et tout le monde avait peur de se rendre aux champs. Aucun commerçant ne s’est hasardé à exposer sa vie au danger pour aller chercher les denrées alimentaires dans les lieux de production. »

La journaliste Jackie est très surprise de voir des hommes et des femmes pousser péniblement des tonnes de charges à vélo le long de cette route en terre battue, sous un soleil de plomb et en franchissant des collines. Ici le vélo est le moyen de transport des pauvres. D’autres, les femmes surtout, portent carrément leurs fardeaux sur la tête.

Il nous a fallu parcourir environ 70 km depuis Mbujimayi pour atteindre le village de Miketa par une piste littéralement couverte de brousse et de hautes herbes. A notre arrivée dans ce village, nous avons été accueillis par des chants et des danses de la petite population locale. Les youyous des femmes perçaient l’air jusqu’au ciel. D’autres femmes jetaient leurs pagnes par terre pour que nous marchions dessus. Je ne sais pas si ce chaleureux accueil était spontané ou préparé, car avant de venir, nous avions prévenu les autorités, notamment le gouverneur de la province du Kasaï-Oriental, Alphonse Ngoyi Kasanji, pour des questions sécuritaires. Nous avions peur de tomber dans des embuscades, notamment parce que deux experts de l’ONU, l’Américain Michael Sharp et la Suédoise Zaida Catalan, et leurs accompagnateurs congolais, ont été sauvagement tués non loin de cette zone et que l’enquête n’avance pas.

Les journalistes de Channel 4 News ont été très émus de voir le niveau de misère des populations locales. Ils ont pris beaucoup d’images. Mais la population avait un autre entendement des choses : elle a pensé que ces Blancs étaient des humanitaires venus leur apporter de l’aide, de la nourriture surtout. J’ai dû leur dire en tshiluba la langue locale : « Ces Blancs ne sont pas des humanitaires. Ils n’ont pas de nourriture à vous donner. Ce sont des journalistes venus compatir à vos malheurs afin d’aller en parler au monde entier. » Apparemment, mon message ne passait pas. Les femmes et les enfants me regardaient bizarrement, parce qu’ils espéraient quelque chose.

Selon l’ONU, cette guerre de la région du Kasaï est l’une des pires crises humanitaires du monde actuellement. Plus d’un million de personnes sont déplacées, et une partie d’entre elles s’est réfugiée en Angola. Au moins 80 fosses communes ont été creusées, des écoles et des hôpitaux détruits, la précarité, la sous-alimentation et la malnutrition se sont aggravées…

Ici à Miketa, beaucoup de villageois qui s’étaient réfugiés en forêt sont rentrés, mais la vie est très dure à reprendre car tous leurs biens ont été détruits pendant la guerre. Ils tentent de reconstruire leurs cases incendiées ou détruites. Certains ont recommencé les travaux de champs. D’autres vivent encore dans des familles d’accueil.

Pas facile de tourner la page Kamwina Nsapu

Il y a quelques mois, la route Mbujimayi – Miabi jusqu’au village de Miketa était infréquentable en raison de la présence des miliciens qui semaient la terreur et la désolation. Aujourd’hui on peut parcourir le trajet en toute sécurité. La paix ainsi retrouvée, les déplacés reviennent et tentent de réorganiser leur vie dans les villages. Un pari difficile en raison de leur extrême pauvreté. « Ce village de Miketa était l’une des zones rouges de la rébellion Kamwina Nsapu. Il y avait ici jusqu’à 700 miliciens qui terrorisaient la population. Parmi eux beaucoup d’enfants… », explique un chef local.

La guerre n’a pas fait que des déplacés. Elle a changé le cours normal de la vie des villageois. Tout est à refaire. Les enfants souffrent de malnutrition aiguë. Ils ne vont pas à l’école. Plusieurs d’entre eux sont sans habits, ils n’ont que culottes rapiécées, torses nus et ventres bedonnants. Pas de couverture pour se protéger du froid. Les villageois manquent de tout et ont besoin d’aide humanitaire d’urgence. Les terres arables ne sont plus assez fertiles dans cette zone. Le maïs, aliment de base dans la région, ne pousse plus comme avant. « Nous cultivons le maïs ici mais le rendement est très faible. Parfois nous sommes obligés d’aller acheter le maïs à Mbujimayi. Ça coûte très cher là bas : 3000 à 4000 francs congolais  (environ 2.5$) par mesure. On souffre pour manger ici », explique un ancien déplacé, père de neuf enfants.

Les retournés espèrent l’aide du gouvernement et des ONG  

Mulumba est l’un des déplacés qui sont rentrés au village de Miketa. Il raconte ce qu’il a vécu pendant la guerre. « Des miliciens Kamwina Nsapu venaient en nombre et sont entrés dans le village après avoir traversé la rivière Lubi de l’autre côté. Ils venaient de la province du Kasaï-Central. Nous avons fui et avons trouvé refuge en brousse. Derrière nous, ces miliciens ont incendié nos habitations et pillé nos plantations et nos récoltes. Que le gouvernement et les personnes de bonne volonté nous viennent en aide au plus vite, sinon on ne comptera que des morts ici ! »

Parmi les déplacés, également de retour dans le village de Miketa, il y a cette femme de 39 ans, Madeleine Mujinga. Elle aussi se souvient de l’attaque du village par les Kamwina Nsapu : « C’était ma première fois de vivre une guerre. Je courais avec mon mari et mes trois enfants. Nous sommes restés près de six mois en forêt. De décembre 2016 à mai 2017. Nous dormions en dessous des arbres et mangions les herbes de champs. Aujourd’hui nous sommes revenus au village, mais nous n’avons pas de moyens. Pas de nourriture. Nous essayons de reconstruire nos habitations, mais c’est difficile car nous sommes affamés. »

Je n’oublierai jamais cette scène pitoyable d’une petite fille d’environ 12 ans qui suivait derrière notre véhicule en courant, la main tendue et demandant de la nourriture. Je ne savais pas que le monde est aussi injuste : un monde où les uns mangent à leur faim et jettent le reste à la poubelle ; et un monde où de pauvres enfants innocents ne peuvent même pas se permettre un seul repas tous les trois jours !

La crise humanitaire dans la région du Kasaï est plus grave qu’on ne la présente. Hélas, le gouvernement congolais estime que la communauté internationale caricature cette crise en la grossissant pour salir l’image du pays. Beaucoup parmi les déplacés ont été choqués d’apprendre que le gouvernement à même refusé de participer à la conférence de l’ONU du 13 avril à Genève qui visait à lever des fonds pour venir en aide à 13 millions de personnes durement frappées par la crise humanitaire en RDC. Une déplacée explose de colère : « Depuis le début  de cette guerre, le  gouvernement ne nous a rien apporté comme assistance. C’est la malnutrition qui nous extermine ici. Pourquoi empêcher la communauté internationale de nous aider ? C’est quel gouvernement ça ? »

Lors de l’attaque du territoire de Miabi, l’administrateur du territoire avait dû, lui aussi, chercher refuge loin de son entité. Il témoigne : « La situation était grave dans cette partie de la province. Il nous a fallu momentanément battre en retraite face à l’avancée des miliciens, le temps de nous organiser pour contrattaquer et restaurer la paix. Et grâce à la détermination du gouverneur Ngoyi Kasanji, nous avons rétabli la paix et l’ordre public. »

Bref, après leur retour dans leur milieu de vie, les déplacés font face aux intempéries et au manque de nourriture. Les enfants sont les plus affectés en raison de la malnutrition. Tout le monde espère que l’aide humanitaire, issue des fonds récoltés lors de la dernière conférence de Genève sur la crise humanitaire en RDC, parviendra aussi à ces enfants malnutris du village de Miketa au Kasaï-Oriental.

Jean-Hubert Bondo

 

 


Lutte contre l’activisme des jeunes dans les groupes armés aux Kasaï

Dans cet espace Grand Kasaï traumatisé par près d’une année d’atrocités entre l’armée et la milice Kamwina Nsapu, la population a vraiment besoin d’entendre autre chose que les bruits de bottes. Elle a hâte d’écouter un message de paix et de réconfort. Et ce message de paix lui est venu grâce à Habari RDC. Dans une conférence-débat organisée à Mbujimayi le vendredi 18 août dernier sur le thème : « Sortir les jeunes des milices et des groupes armés », les jeunes du Kasaï-Oriental -en majorité âgés de 16 à 27 ans- se sont exprimés sans complaisance, ni tabou. Ils demandent que cessent définitivement les atrocités et que la paix revienne dans leur province. Parmi les intervenants, il y avait le gouverneur de la province Alphonse Ngoyi Kasanji.

Dans son intervention, le gouverneur du Kasaï-Oriental, Alphonse Ngoyi Kasanji, un des orateurs du jour, a vivement remercié Habari RDC pour cette initiative qui contribue à la promotion de la paix. Il a souhaité qu’Habari continue à organiser ce genre d’activités dans la province. Ngoyi Kasanji a retracé le contexte dans lequel ont commencé les violences au Kasaï-Oriental. Pour lui, l’ancien chef coutumier Kamwina Nsapu a enrôlé les jeunes, et les a drogués afin de voler, violer, tuer et attaquer les symboles de l’Etat. Ce qui a entraîné plusieurs conséquences néfastes, notamment  la paralysie des activités quotidiennes des populations, la destruction des infrastructures (écoles, églises, édifices publics), la malnutrition sévère des enfants, etc.

La jeunesse, une force dans la dynamique du progrès

Selon le gouverneur, la paix a été restaurée grâce à l’intervention des forces de l’ordre. Il invite les jeunes à ne pas se laisser manipuler pour semer le chaos et la désolation. Pour lui, « la jeunesse doit comprendre qu’elle est une force non négligeable dans la dynamique du progrès de la province du Kasaï-Oriental ».

Et d’ajouter : « Les jeunes ne doivent pas céder à la séduction des démons, à l’intoxication et à la désinformation, car les milices et les groupes armés sont dirigés par des individus aux agendas obscurs. » Ngoyi Kasanji a également exhorté les jeunes à ne pas consommer aveuglément toutes les informations diffusées sur Internet, estimant que les jeunes sont souvent manipulés à partir de contenus qu’ils tirent des réseaux sociaux.

La pauvreté incite les jeunes à adhérer aux groupes armés

Le contexte actuel de la RDC favorise l’adhésion des jeunes à des milices et à des groupes armés, a démontré Maître Paulin Cimanga, coordonnateur du réseau pour la réforme du secteur de sécurité et de justice (RRSSJ). Selon lui, le pays traverse la période la plus critique de son histoire, caractérisée par l’instabilité politique, le non-respect de la Constitution et de l’accord politique du 31 décembre 2016, la paupérisation du pays, le marasme économique, l’instabilité monétaire ainsi que le chômage.

Face à cette situation sombre, plusieurs jeunes naïfs ont été instrumentalisés. Maître Paulin explique que le manque d’instruction et le chômage des jeunes rendent vulnérables ces derniers et les poussent à adhérer à n’importe quel mouvement. Il a plaidé en faveur de l’instruction des jeunes et de leur accès à l’emploi bien rémunéré, en vue de prévenir leur adhésion à des groupes armés.

Le tableau sombre de la situation des enfants en RDC, particulièrement dans les KasaÏ a été présenté par Yvonne Ngoyi, chargée de plaidoyer à l’ONG Save the Children. Faisant référence au rapport de l’Unicef de juillet 2017, elle a fait remarquer que 40 à 60 % des effectifs des milices sont constitués d’enfants de moins de 15 ans ! Plus de 500 cas d’enfants utilisés comme boucliers humains ont été enregistrés. Elle a relevé les instruments juridiques existant pour protéger les jeunes. Bien que les enfants continuent d’être enrôlés dans des milices et des groupes armés en RDC, Yvonne Ngoyi a salué le fait que désormais les structures de protection des enfants sont associées aux recrutements au sein des FARDC pour veiller à ce que des enfants ne soient enrôlés dans l’armée.

Réactions des participants

Un échange très riche entre les orateurs et les participants a suivi ces exposés. Certains nous ont livré leurs impressions. Le député Nyembwa Nyerere déclare : « Ce qui m’a intéressé d’abord c’est le thème : ‘’Sortir les jeunes des milices et des groupes armés’’ mais aussi la présence de l’autorité provinciale. On doit multiplier des séances de ce genre en vue de panser les plaies qui existent dans les têtes des jeunes qui avaient choisi d’adhérer à la milice Kamwina Nsapu. »

Henriette Kankolongo est avocate au barreau de Mbujimayi : « Je suis très contente de cette conférence-débat  organisée par Habari RDC. Le thème était très important, un sujet d’actualité dans notre province. Les jeunes qui sont dans des milices voient leurs mémoires affectées par des pratiques mystico-fétichistes et cela peut les rattraper dans la vie professionnelle. Je vais faire la restitution de cette conférence à notre structure de défense des droits de l’Homme, afin d’emboîter le pas à Habari RDC. »


Journée ville morte en RDC après des coupures internet

Une démocratie sans Internet, ça existe ! La République démocratique du Congo en est une. En fait, elle ne recourt à l’internet que quand elle en a besoin et le coupe immédiatement quand l’opposition essaie de s’en servir pour répandre son mot d’ordre de journée ville morte. C’est ce qui est arrivé ces mardi et mercredi. Comme vous le savez, en RDC, les réseaux sociaux sont comptés parmi les fauteurs de troubles dans le pays. Ils dérangent l’ordre public et la quiétude du régime.

Ce jour-là, j’ai un peu consulté la liste des ennemis du régime de Joseph Kabila : on y trouve la communauté internationale, l’opposition, mais aussi les réseaux sociaux. Facebook, Whatsapp, Twitter, Instagram, Youtube… Raison pour laquelle, lorsque l’opposition a appelé à deux journées ville morte mardi et mercredi 7 et 8 août en RDC, le régime a immédiatement riposté par des journées réseaux sociaux morts. Comme ça, il y a match nul. 

Voici un extrait de la correspondance adressée aux fournisseurs de réseaux internet par le directeur de l’Autorité de régulation des postes et des télécommunications du Congo  (ARPTC) : «… Je vous prie de prendre, dès réception de la présente, des mesures techniques préventives susceptibles de réduire au strict minimum la capacité de transmission des images sur les réseaux sociaux. Facebook, YouTube, Wattsaps, Linkendin, Viber, Skype, Twitter… » Les fournisseurs de services d’internet ont obéi malgré l’appel de Reporter sans frontières leur demandant de résister. Ce calvaire, les Congolais y sont habitués. Les pauvres ! Ils savent que quand on coupe la communication c’est pour permettre que les exactions et les violations des droits de l’homme se passent à huis-clos.

Personnellement je me demande si le régime a bien raisonné en coupant les réseaux sociaux, car tout le monde a su que c’était pour contrer l’opposition. Et dans ce cas, le résultat profite à l’opposition, car la coupure ou la perturbation des réseaux sociaux n’a fait que contribuer à amplifier ces journées ville morte. Heureusement, les Congolais savent déjà contourner ces restrictions de leur liberté en ligne en recourant au VPN.

Où est la démocratie ?  

Vous vous demandez peut-être pourquoi le Congo s’appelle République démocratique tout en faisant une telle censure des libertés publiques et des réseaux sociaux. Vous avez raison. S’appeler République démocratique ne veut pas dire qu’il y a la démocratie. « Démocratique » peut être juste un nom de baptême, disons un prénom ou un nom chrétien car le Congo est en majorité catholique. C’est un peu comme Mobutu : son prénom était  »Joseph Désiré », alors qu’il était lui-même indésirable dans le pays. Et quand il a compris cela, il a eu la sagesse de refuser tout prénom français, sous prétexte du retour à l’authenticité africaine. Donc le nom n’est rien ! C’est le caractère qui compte. Par ces perturbations répétées d’Internet, la RDC démontre qu’elle est indigne des innovations numériques.

Ce mercredi, un jeune Congolais, agacé par ces restrictions des réseaux sociaux, s’est exclamé: « De grâce privez-nous d’élections, mais laissez-nous au moins l’Internet. »


Afrique centrale, la plus mauvaise destination touristique

L’Afrique centrale apparaît aujourd’hui comme la région la plus instable de l’Afrique subsaharienne. Elle est devenue une sorte d’agglomération de tous les mauvais régimes qui font la honte du continent. L’Afrique centrale accuse un énorme retard sur le plan démocratique par rapport à des régions comme l’Afrique de l’Ouest.

Alors que l’Afrique de l’Ouest marque des points en terme d’avancées démocratiques, l’Afrique centrale tourne en rond. Guerres, malnutrition, réfugiés, changement de Constitution, répression politique, groupes armés, déplacés internes, troisièmes mandats, fosses communes… C’est la région où les relations avec la communauté internationale sont régulièrement tendues. Motif, les chefs d’États ne veulent pas que l’Occident condamne leurs mauvaise gouvernance et violations des droits de l’homme. Ils appellent cela « ingérence dans les affaires internes des États souverains ».

Les villes à risque en Afrique centrale

Si vous venez en Afrique centrale, il est des villes et des provinces où vous ne devez pas vous hasarder à visiter. Au Congo Brazzaville par exemple, n’osez pas vous rendre dans la région du Pool. Sassou Nguesso bombarde cette région chaque jour. Le Pool est devenu un site où l’on peut essayer toutes les armes du régime de Brazzaville, alors que des civils y vivent. En RDC, attention à Beni et surtout aux Kasaï. Ici on égorge les visiteurs en les filmant. Deux experts de l’ONU (un Américain et une Suédoise) y ont été tués en mars dernier. Aujourd’hui, on compte déjà plus de 80 fosses communes dans les Kasaï.

En Centrafrique, évitez de vous promener dans la ville de Bangassou ou à Bria. Là-bas les Seleka, les FPRC et les anti-Balaka font la loi. Au Burundi, attention aux Imbonerakure, la milice créée par le regime de Pierre Nkurunziza… Voilà votre Afrique centrale.

Un tourisme politique, pourquoi pas ?

Si les massacres, les horreurs, la honte, la médiocrité, et les régimes totalitaires  pouvaient être rangés parmi les écotourismes, on pourrait inviter les touristes du monde à venir contempler ces choses en Afrique centrale. C’est ici que se perpétuent la plupart des régimes du type stalinien. Les modifications des Constitutions et les troisièmes mandats interdits sont en quantité en Afrique centrale. Je pense que cela peut  intéresser les touristes. Ils peuvent venir voir ce qu’ils n’ont jamais vu dans d’autres régions du monde. C’est en Afrique centrale que vous trouvez des chefs d’État au pouvoir depuis plus de 30 ans. Et ils vous disent qu’ils sont là par la volonté populaire.

Touristes,  venez nombreux voir un président comme Teodoro Obiang Nguema de Guinée Équatoriale : 38 ans au pouvoir. Il est arrivé au pouvoir alors qu’Emmanuel Macron était encore un bébé d’environ un an ! Aujourd’hui, Teodoro et Macron sont devenus des homologues chefs d’États ! Touristiquement parlant, c’est intéressant : le président Teodoro peut-être une « merveille » à visiter en raison de sa longévité au pouvoir. On peut lui demander comment il a fait pour être toujours  président, survolant à lui seul trois décennies, il se dirige vers une quatrième.

Une autre « merveille » politique, historique et touristique c’est le Camerounais Paul Biya, au pouvoir depuis 1982. Cela fait aujourd’hui 35 ans qu’il est là et ne bouge pas. À cette liste, ajoutez également Sassou Nguesso du Congo Brazzaville.  D’abord chef de l’État de 1979 à 1992, puis de 1997 jusqu’à ce jour. En 2016, il a modifié la Constitution et s’est octroyé un troisième mandat. Que dire du Tchadien Idriss Déby Itno, de Kabila en RDC ou de Pierre Nkurunzinza du Burundi ?

Au Rwanda, présenté comme un bon gestionnaire,  Paul Kagame a la possibilité de rester au pouvoir jusqu’en 2034 ! En dehors du mémorial du génocide à Kigali, Kagame serait un autre mémorial vivant. De tels chefs d’États sont eux-mêmes des écotourismes, donc des monuments touristiques vivants que l’on peut venir contempler. Comment ils font pour rester si longtemps au pouvoir ?


Les mouvements citoyens sont-ils fatigués en Afrique ?

La question vaut son pesant d’or aujourd’hui en Afrique. Où sont passés les mouvements citoyens ? Les rues des capitales africaines sont devenues trop calmes ces derniers temps. On n’entend plus parler des marches pacifiques, des journées villes mortes ou des actions de désobéissance civile. Désormais, les mauvais régimes sont en paix et se la coulent douce. Les nuits de nos dirigeants ne sont plus agitées comme auparavant. Que se passe-t-il ? Est-ce pour dire que tout va désormais pour le mieux sur le continent ?

La vérité est que les mouvements citoyens se sont essoufflés. Ils sont usés par la longueur du temps et le durcissement des régimes. Or, ce n’est pas maintenant le moment d’abandonner la lutte. Ce n’est pas le moment de se compromettre avec ces régimes qui ont mis nos pays à genoux.

Les rues calmes profitent aux dictateurs

On n’entend plus parler de nos jeunes héros que sont Y en a marre au Sénégal, et Balai citoyen au Burkina. En RDC, Filimbi et Lucha se font plus discrets. Leur campagne dénommée bye-bye Kabila s’est éteinte. Pourtant ces mouvements citoyens étaient devenus la voix des Africains sans voix. Ils donnaient des insomnies aux régimes. Aujourd’hui, silence radio. Réveillez Sassoufit au Congo-Brazzaville et Tournons la page. Pourquoi dorment-ils en plein jour ? Ont-ils jeté le flambeau qu’ils avaient eux-mêmes allumé ? Leur silence nous inquiète. Voilà que les régimes ont repris du poil de la bête. Les dictateurs nous tuent chaque jour davantage, puis ils se dressent sur nos cadavres et disent : le pays est en paix ! Les rues qui dérangeaient sont paisibles.

Les opposants n’y croient plus

On voit des signes de lassitude même dans les partis d’opposition. Beaucoup d’opposants se sont fatigués sans avoir atteint le but, celui d’obtenir l’alternance démocratique. Regardez Jean Ping au Gabon, Katumbi en RDC, Tsvangirai au Zimbabwe… Leur combat politique ressemble à un baroud d’honneur. Pourtant, nous les avions prévenus que la lutte ne serait pas facile. Ces dictateurs que vous voyez ont survécu aux ouragans de la perestroïka et du printemps arabes. Ils ont modifié la Constitution et se sont maintenus. Pour les déboulonner il faut être forts, et surtout s’armer de patience.

Les pots de vin ont-ils circulé ?

Certains de ces animateurs des mouvements citoyens ne sont peut-être plus innocents. Certains ont touché l’argent des régimes de leurs pays. Ils ont désormais des comptes en banque et ne peuvent plus parler. En RDC par exemple, le mouvement citoyen NOGEC soutient désormais le gouvernement. Pourtant c’est un mouvement qui avait brillé par une campagne retentissante de sifflets, exigeant le départ de Kabila au 19 décembre 2016 date marquant la fin de son dernier mandat constitutionnel. Aujourd’hui, ce mouvement citoyen a même annoncé son intention de se muer en parti politique pour briguer des postes aux prochaines élections, sous le parrainage du Premier ministre Bruno Tshibala.

Jeunesse africaine, levez-vous, le continent est en danger !


RFI gêne le régime de Kinshasa

En RDC, être journaliste c’est déjà un problème avec le régime. Plus grave, être journaliste de RFI, c’est encore plus compliqué car vous n’aurez plus d’accréditation à Kinshasa. Sonia Rolley l’a appris à « ses dépens ». Son accréditation n’a plus été renouvelée. Son seul tort est d’être journaliste de RFI. Déjà le signal de la Radio mondiale est coupé à Kinshasa depuis bientôt huit mois. Le même signal de RFI capté à Brazzaville est brouillé à partir de la RDC.

Chez nous au Congo, ne peuvent recevoir d’accréditation que les journalistes qui sont « polis » envers le régime et qui savent que toute vérité n’est pas bonne à dire. Ou encore qui savent faire la soustraction : dire deux morts là où il y en a eu 120 ; applaudir là où il faut dénoncer… Hélas, il paraît que Sonia Rolley n’était pas ce genre de journaliste là. C’est cela qui lui a coûté son accréditation.

Peut-être que vous ne le savez pas : dans la poche du gouvernement congolais, il n’y a pas que l’argent : il y a aussi le Parlement, les Cours et les tribunaux, mais aussi les médias publics tels que la Radio télévision nationale congolaise  (RTNC). Ce sont-là les prisonniers personnels du régime.

Sonia Rolley très populaire en RDC

Le problème avec RFI est qu’elle n’a que des journalistes et non des chantres du régime comme nous en avons chez nous. Sonia Rolley a couvert avec professionnalisme la crise congolaise, nul ne peut lui reprocher un parti pris ou une prise de position partisane dans ses reportages. Derrière son sourire et ses lunettes rectangulaires se cachent une fermeté et une rigueur qu’exige le journalisme.

Son courage était tel qu’elle est allée chercher l’information en personne même à Tshimbulu, fief de la terrible milice Kamwina Nsapu dans le Kasaï. Beaucoup d’autres journalistes n’ont pas osé mettre leurs pieds là-bas. On leur dicte des choses au téléphone. Mais Sonia Rolley a survécu dans cette région du Kasaï où deux experts de l’ONU ont laissé leurs peaux. Son courage lui vaut le respect et l’admiration des millions d’auditeurs de RFI en RDC. La journaliste est désormais trop connue pour son web-documentaire sur les violences dans les Kasaï. Voilà pourquoi le régime de Kabila lui en veut et refuse de renouveler son accréditation.

Courage RFI, courage Sonia Rolley.


Moïse Katumbi, l’homme qui fait peur à Kabila

Il y a moins de deux ans seulement, nul ne pouvait s’imaginer Moïse Katumbi devenir l’un des pires ennemis de Joseph Kabila. Jusqu’en 2015, il était parmi les plus fidèles collaborateurs du président congolais. Ce temps-là est révolu. Aujourd’hui, l’ancien gouverneur du Katanga est l’opposant qui fait le plus peur au régime de Kinshasa. Le nom même de Moïse Katumbi fait trembler la majorité présidentielle.

En RDC, les opposants n’ont pas le même poids politique et financier. Les uns sont légers et faciles à débaucher à coup de billets de banque. Les autres sont lourds, farouches et incorruptibles. Moïse Katumbi est de cette dernière catégorie. Il pèse des tonnes. Il n’est pas l’un de ces opposants « alimentaires » qui tremblent devant l’argent du régime. Nul n’ignore que Katumbi a vécu dans l’opulence avant même d’entrer en politique.

Katumbi, l’homme à abattre

Moïse Katumbi a commis deux péchés cardinaux qui lui ont valu une haine viscérale du régime de Kinshasa : le premier péché est d’avoir claqué la porte du PPRD le parti du chef de l’État en dénonçant les velléités du régime de vouloir donner un troisième mandat à Joseph Kabila. Le deuxième péché de Katumbi est d’avoir rejoint l’opposition et de s’être déclaré candidat à la présidence de la République. Chose que Joseph Kabila n’est pas encore prêt à lui pardonner.

Multiplier les obstacles contre Katumbi

Une autre chose qui fâche c’est la popularité de Moïse Katumbi. Deux sondages crédibles le donnent vainqueur de la présidentielle en RDC. En clair, si l’élection présidentielle est organisée de manière transparente et démocratique, Katumbi succéderait à Kabila. Le régime le sait très bien. C’est ce qui explique tous les obstacles judiciaires que l’on met sur son chemin pour l’empêcher de revenir au pays. Pour commencer, on l’a accusé d’atteinte à la sûreté de l’État et de spoliation d’immeubles. Imaginez un milliardaire comme Katumbi spolier un immeuble !

Aujourd’hui, le ministre congolais de la Justice vient de lui ajouter une nouvelle infraction : la double nationalité. Selon le ministre Thambue Muamba, Moïse Katumbi a la nationalité italienne et sa candidature ne peut donc pas être recevable à l’élection présidentielle en RDC ! Formidable ! Pourtant, pendant près de huit ans, ce même Katumbi était gouverneur du Katanga et membre influent de la Majorité présidentielle. À l’époque, on ne nous a jamais dit qu’il avait la nationalité italienne…

 

 


Trump et Kim Jong-un, les deux grands extrémistes du moment

Entre Donald Trump et Kim Jong-un, je choisirais Macron. Trump et Kim, c’est un peu comme la peste et le choléra. La seule chose qu’ils ont en commun est qu’ils sont fous tous les deux. Voilà qu’ils jouent avec la vie du monde entre leurs mains.

Comment Américains et Nord-coréens ont fait pour donner le pouvoir à de tels fanatiques ? Deux pyromanes, l’un  en Orient, l’autre en Occident. Le plus grand danger est qu’ils sont aux affaires au même moment et ils jouent un genre de ping-pong. Kim joue avec des missiles,  Trump joue avec le climat : il a retiré le pays de l’Accord de Paris. Il traite les affaires sérieuses par de simples tweets. Cette légèreté est dangereuse, car  un jour il appuiera sur le bouton nucléaire pensant qu’il fait un tweet !

Les sanctions pour dissuader

Je suis pleinement d’accord avec les sanctions de l’ONU contre le régime nord-coréen, mais je pense que les États-Unis devaient également être sanctionnés pour leur retrait de l’Accord de Paris sur le climat. Ce pays est le deuxième plus gros pollueur de la planète après la Chine. Trump lui-même, depuis qu’il est là, n’a fait que polluer la politique américaine et internationale. Kim Jong-un et Trump, à eux deux, peuvent brûler le monde. Leur politique n’est que menaces, provocations, polémiques et folie de grandeur.

De mauvais dirigeants, il y en a sur tous les continents

L’Afrique n’est donc pas le seul continent avoir des dirigeants voyous. Les chefs d’État voyous, il y en a plein partout. Bachar Al Assad par exemple : c’est le diable en personne dans l’enfer syrien. Poutine est un pirate informatique, du moins c’est ce qu’on dit du Kremlin. Mais Trump est tout ce qu’on ne devait jamais avoir à la Maison Blanche. Il est imprévisible. Nul ne connaît ce que sera son prochain tweet. En 100 jours, Trump a détruit les relations laborieusement construites par les États-Unis pendant des décennies avec le reste du monde. Kim Jong-un n’est pas si fort que ça, au moins il a le courage de se mesurer militairement aux États-Unis. Parfois, il faut des gens comme ça.

Les autres dirigeants sont peut-être moins dangereux, mais ils commettent aussi des erreurs graves. Theresa May regrette d’avoir organisé les législatives anticipées : elle a perdu la majorité absolue qu’elle avait au Parlement britannique. En plus, c’est elle qui, devant Dieu et devant l’histoire, va isoler le Royaume-Uni du reste de l’Europe par le Brexit. Macron, quant à lui, apprend encore le volant ; déjà on lui a donné le permis de conduire, de conduire la France. La droite et la gauche françaises lui en veulent. Angela Merkel est en quelque sorte l’ange gardien de l’Europe : pour cela, elle empêche l’alternance en Allemagne. Déjà trois mandats à son actif comme Chancelière et pourrait briguer un quatrième.