Qui dirige la RDC: le gouvernement congolais ou la Monusco ?

8 avril 2015

Qui dirige la RDC: le gouvernement congolais ou la Monusco ?

Les casques bleus en RDCLes casques bleus en RDC

Les casques bleus en RDC

Un Etat ne peut avoir au même moment deux centres de pouvoirs parallèles ou deux puissances publiques concurrentes. Pourtant ça semble être le cas aujourd’hui avec la Monusco en RDC.

La Monusco (Mission de l’ONU pour la stabilisation du Congo) n’est plus une simple mission de pacification qu’elle devait être, elle est devenue un pouvoir d’Etat à part entière, un pouvoir qui porte ombrage à l’Etat congolais. Cela est d’autant plus mal vu par une bonne frange de Congolais surtout lorsque le bilan même de la Monusco est très controversé en 15 ans passés en RDC.

Plusieurs fois, il est arrivé que le gouvernement congolais décide une chose, et la Monusco de son côté décide exactement le contraire ! Souvent ce que la Monusco décide s’applique. Si bien que d’aucuns se demandent qui gouverne la RDC aujourd’hui ? Est-ce le gouvernement congolais ou la Monusco ?

Récemment, à la surprise générale, la Monusco a obligé la RDC à remplacer 2 généraux congolais dans la direction des opérations militaires contre les combattants hutu rwandais des FDLR, chose que Kinshasa a catégoriquement rejetée au nom de la souveraineté du pays. En conséquence, la Monusco a décidé de ne pas participer à la traque des FDLR, ce qui est un manquement à ses obligations, car la neutralisation des groupes armés fait partie de son mandat.

Autre exemple, après la défaite de la rébellion du M23, Kinshasa avait décidé de combattre les rebelles ougandais des ADF-Nalu, mais la Monusco s’était opposée énergiquement en disant que les ADF-Nalu n’étaient pas une priorité et que pour elle, il fallait plutôt combattre les FDLR. Pourtant, la suite des événements a donné raison au gouvernement congolais, car les ADF-Nalu ont été à l’origine de véritables carnages et de graves atrocités sur les populations civiles dans la ville de Béni et ses environs. On avait dénombré plus de 300 personnes abattues aux armes blanches, sans compter les maisons incendiées et les plantations ravagées.

La vérité est qu’à l’heure actuelle, la Monusco devient une véritable épine sous le pied de la souveraineté de la République démocratique du Congo. Ne serait-ce que par effet domino, sa présence affaiblit et contrecarre l’autorité du gouvernement congolais. Ce qui est choquant c’est que la Monusco n’a même pas un chronogramme clair d’activités à réaliser année par année dans le cours, moyen et long terme pour être évaluée sur le résultat afin d’envisager son retrait : on ne connaît pas ce qu’elle fera en 2018, 2022 ou 2025. Donc la Monusco est là comme ça.

Il est vrai que nul en RDC ne peut ignorer les bienfaits de l’action de la Monusco; sa présence a permis d’organiser deux fois les élections générales dans le pays avec les résultats que tout le monde connaît. Néanmoins, nous Congolais nous avons aussi besoin de nous diriger nous-mêmes. Loin de nous d’être ingrats vis-à-vis de tout le sang de vaillants casques bleus morts dans leur mission de pacification. Seulement la Monusco doit achever sa mission et partir : 15 ans en RDC c’est quand même trop. En termes d’évaluation, 15 ans c’est plus que le long terme. Aucun Etat au monde n’a été créé pour vivre éternellement sous protection de l’ONUou pour être cogéré avec l’ONU.

Or dans l’état actuel des choses, la Monusco dans son organigramme fonctionne exactement comme un Etat dans l’Etat congolais : elle dispose de tout un gouvernement dont le mandat est sans cesse renouvelé au siège de l’ONU à New York.

Comme tout pays, la Monusco a un « président » appelé ‘’: représentant spécial du secrétaire général de l’ONU ‘’. Les décisions du président de la Monusco ont une portée nationale et sont tout aussi obligatoires et exécutoires que celle du chef de l’Etat en RDC.

La preuve que la Monusco exerce tous les attributs de l’Etat, elle a une administration publique, une force de police, une armée avec toutes ses composantes : forces terrestres, forces aériennes, unités spéciales… c’est-à-dire des forces opérant au Congo sans être contrôlées par le gouvernement congolais. Le budget annuel de la Monusco est d’environ 1,5 milliard de dollars alors que le budget militaire de la RDC n’est que 247 petits millions de dollars ! Comparez la différence.

La Monusco a ses « ministres » qui gèrent chaque secteur de la vie nationale, en concurrence avec le gouvernement officiel de la RDC. Ses ministres sont appelés des ‘’ chargés de ‘’. Exemple :

  • Chargé des droits de l’homme = c’est l’équivalent du ministre des Droits humains.
  • Chargé de la justice = équivalent du ministre de la Justice.
  • Chargé des affaires électorales = équivalent de la Commission électorale.
  • Chargé des affaires politiques = équivalent du ministre de l’Intérieur.
  • Chargé de l’information publique = équivalent du ministre de la Communication…

Bref, un gouvernement à part entière !

La Monusco a aussi ses propres gouverneurs dans chaque province : on les appelle les chefs de bureaux. Ils gèrent et font rapport à leur hiérarchie, exactement comme les autres gouverneurs attitrés des provinces. La Monusco a même sa propre radio publique pour véhiculer sa vision, ses décisions et faire sa propagande.

Plus grave, tel un parquet général, la Monusco reçoit des mémos, des plaintes et des dénonciations faites contre le gouvernement congolais. C’est ainsi qu’au Congo la plupart des marches de l’opposition ou des associations ont pour point de chute les QG de la Monusco.

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