Wivine Kabengele : porter haut la culture congolaise par le chant choral

Article : Wivine Kabengele : porter haut la culture congolaise par le chant choral
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5 avril 2020

Wivine Kabengele : porter haut la culture congolaise par le chant choral

Terre de musique dansante, la RDC l’est depuis toujours, avec le ndombolo et la rumba congolaise. Mais des groupes musicaux initiés et dirigés par des femmes se comptent sur les doigts d’une main. Dans cet environnement macho, une femme, Wivine Kabengele, s’est frayée un chemin et nous propose des sonorités originales. Son groupe s’appelle Bel Canto.

En cette période où la pandémie de coronavirus a réduit la musique de scène au silence, je ne peux pas ne pas exprimer ma solidarité avec les artistes. Je partage leur peine et les exhorte à tenir bon. D’autres parmi les chanteurs, comme le saxophoniste camerounais Manu Dibango, sont même décédés, emportés par ce maudit Covid-19. Concerts annulés ou reportés, enregistrements suspendus en studio, j’ai compris que c’est un virus venu tuer l’art, la musique et la vie sur terre. Et c’est inacceptable !

Wivine Kabengele toujours au front

En plein confinement à Kinshasa pour cause de Covid-19, j’ai pu échanger avec Wivine Kabengele, la fondatrice de l’ensemble vocal Bel Canto. C’est une femme battante et déterminée. Son credo : porter encore plus haut le flambeau de la culture congolaise à travers l’art vocal. « Le Congo, notre pays, a une richesse culturelle immense, mais oubliée. Mon combat c’est de la mettre en valeur par le chant choral », explique Wivine Kabengele.

Séance de répétition de l’ensemble Bel Canto

Malgré le blackout imposé à la musique par le Covid-19, Wivine ne baisse pas les bras. Elle travaille sur plusieurs projets, notamment :

  • La tenue de la session de formation vocale à Kinshasa, ouverte à tout celui qui veut s’améliorer vocalement ;
  • les Noces de Figaro. Il s’agit d’un opéra de Mozart que le groupe Bel Canto pourra interprêter lors de plusieurs productions en France et en Afrique, avec le coaching vocal et technique d’Agnès Brosset, professeure d’art vocal en conservatoire ;
  • sa participation au festival africain de chant choral Africa Cantat prévu en juillet 2020 à Nairobi au Kenya ;
  • un concert de musique à l’occasion de la journée internationale du chant choral en décembre prochain, où un accent particulier sera mis sur le folklore congolais.
Une séance d’initiation musicale organisée par Bel Canto

L’ensemble Bel Canto attendu en Bretagne

Sauf impossibilité majeure, Wivine et son groupe se produiront cette année à Pontivy, une ville bretonne située dans le département du Morbihan, entre la Manche et l’Océan atlantique. Là-bas vit une « forte communauté congolaise », me confie mon amie mondoblogueuse Françoise Ramel, une élue locale très attachée aux échanges internationaux, à la création artistique et aux projets qui ciblent en priorité la jeunesse. Mais c’est aussi à Pontivy qu’Agnès Brosset, qui était à Kinshasa en avril 2019 pour animer une première session de formation avec l’ensemble Bel Canto, a créé un centre de ressource national unique, au cœur d’un vaste territoire rural,  l’Académie d’art vocal.

À propos de l’arrivée prochaine de Bel Canto à Pontivy, Françoise Ramel est enthousiaste. Elle explique : « Quand Agnès Brosset m’a parlé de ce projet de résidence à Pontivy de jeunes chanteurs autodidactes congolais, passionnés de chant lyrique, cela a bousculé mes préjugés et fait naître une vraie curiosité. À l’occasion de la Saison Africa 2020,  recevoir l’ensemble Bel Canto, accompagner cette demarche de création avec l’Académie d’art vocal, amener les écoles à s’y intéresser, à chanter pour et avec l’Afrique, c’est une opportunité rare pour une ville comme la nôtre. »

Et d’ajouter : « Pontivy recèle des milliers d’histoires singulières avec le continent africain, son patrimoine ; ses langues, ses richesses culturelles, mais aussi ses stratégies de développement économique, dont la culture est un pilier trop souvent oublié. Et nous n’en faisons rien. Pourquoi ? »

Grâce à Mondoblog, à son travail journalistique et associatif, Françoise Ramel fait partie du Comité académique Africa 2020 créé en Bretagne le 16 décembre 2019 à l’initiative du ministère de l’Education nationale. Cela ne m’étonne pas. Je me souviens de notre rencontre à Dakar en décembre 2015, au cours d’une formation Mondoblog-RFI.

J’ai été d’emblée marqué par sa générosité, son humilité et surtout sa grandeur d’esprit. Quand je rencontre quelqu’un, avant de lui faire confiance, je l’observe, je le « scanne », comme on dit en Côte d’Ivoire. Françoise aime travailler, collaborer avec des amis ou des inconnus, c’est une grande qualité. Comme Wivine, elle est ce genre de femmes qui n’abandonnent jamais, qui tendent leurs mains pour que s’attrapent les continents et que les générations d’après construisent leurs propres histoires d’amitié entre les peuples, entre les cultures.

Le contexte actuel, sans précédent, nous apprend brutalement que cette nécessité d’agir et de réagir ensemble, de façon responsable et solidaire, est plus que necessaire.

De grosses ambitions, sans moyens

C’est pourquoi porter l’ambition de créer un opéra de Mozart à Kinshasa suscite tant d’intérêt, même si Wivine et l’ensemble Bel Canto doivent encore batailler pour faire avec l’absence de moyens. C’est malheureusement le propre des artistes africains en général, et congolais en particulier. « J’ai reçu des invitations ici et là en Afrique. J’ai envie de parcourir les 26 provinces du Congo, aller à la rencontre de toute la diversité culturelle de mon pays. Mais les moyens me manquent pour déplacer mon groupe », m’a confié la cheffe du groupe Bel Canto. Pourtant, elle ne perd pas espoir.

Du 6 au 13 avril 2020, l’ensemble Bel Canto devait bénéficier de la deuxième édition de la formation vocale avec comme formateurs Thierry Thiebaut, président d’À cœur joie international, et Agnès Brosset, créatrice de l’Académie d’art vocal, Pontivy. Ces deux professionnels de renommée internationale animent bénévolement cette formation de grande qualité, à laquelle d’autres chanteurs, chanteuses, peuvent s’inscrire naturellement. En raison de la crise sanitaire mondiale liée à la propagation du Covid-19, la tenue de cette session 2020 a été reportée à une date ultérieure.

Pour en savoir plus et soutenir ce beau projet de coopération artistique, suivez l’ensemble Bel Canto sur les réseaux et profitez-en pour suivre aussi la riche actualité à venir de la Saison Africa 2020. Initialement programmées de juin à décembre, les différentes manifestations culturelles vont devoir s’organiser sur la base d’un nouveau calendrier, comme vient de l’annoncer le journal Le Monde.

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